Avec cette représentation, on peut voir que c’est la forme qui fait sens. On peut voir par l’intermédiaire de l’ombre projetée, la création d’une forme chimérique. Le visage de l’homme s’inscrit par l’intermédiaire même de la corporité de la femme qui le représente. Cette distorsion dans la représentation nous permet d’accéder à un sens autre que celui de la légende : la femme dessine ses propres traits par l’intermédiaire du visage de son amant. Ce qui est étonnant, c’est qu’alors que la flamme de la bougie se consume et crée une lumière assez blanche. Le peintre crée une analogie iconologique entre la femme et la bougie : comme elle, la jeune fille se consume. Par le rapport qui se crée entre les deux, on a pratiquement l’impression que le scénario s’inverse : ce n’est pas tant l’homme qui va partir que la femme qui inscrit un mouvement de disparition vers le hors champs.
La démarche en analyse se situe dans un continuum descripto-analytique. C’est-ce mouvement d’aller retour qui permet au critique d’avancer. Analyser une œuvre, c’est revenir à la matière de l’œuvre, à sa singularité. L’Œuvre d’art est un corps autonome : on comprend la forme de manière indépendante de sa création et de la démarche de l’artiste. Au bout d’un moment, il n’y a plus tellement d’histoire à l’origine d’une forme.
IV/ Quatrième dialectique : représenter la même chose mais de façon différente. Les représentations se nourrissent entre elles.
En quoi la forme devient parlante?
*L’annonciation, Veneziano
Ici, on a une séparation entre l’espace de l’ange et celui de la Vierge. Il se crée aussi, par l’intermédiaire de l’architecture, un lieu d’enfermement de la figure féminine, qui nous apparait aussi verticale que les colonnes. Ce que raconte l’annonciation ici, c’est la scène originelle (cf. l’alcôve qui donne sur une porte fermée, l’ange Gabrielle qui tient des lys, repris dans le couloir, ce qui crée un mouvement entre le premier et le deuxième plan).
*L’annonciation, Titien.
En quoi une œuvre est-elle autonome? En quoi la forme porte-t-elle un sens? Ici, contrairement à Veneziano où le coprs de Marie est en retrait, elle est beaucoup plus en mouvement (plis des habits qui suivent le corps et rappellent les plis de la chair => représentation beaucoup plus sexualisée). Corps féminin ouvert.
*L’annonciation, Le Caravage
Marie ensevelie, repentante. SA posture évoque davantage le deuil.
=> trois œuvres avec le même thème mais qui raconte des choses différentes, toujours sous tendues dans la Légende.
Agnès Minazzoli essaie de comprendre ce qui constitue la nature de l’image. Pour elle, l’image est de nature spéculaire : elle renvoie toujours à d’autres œuvres : « L’image porte en elle une absence que nous ne pouvons combler quand c’est peut être l’absence qui nous conduit au cœur de l’image ». Quelque part, la représentation qui fonde l’image porte toujours en elle un sens caché, « une doublure d’invisibilité propre à toute visibilité ». L’interprète est finalement celui qui essaierait de dévoiler l’œuvre à son autre dimension.
Le visible se tient sur 4 dimensions :
1-l’image s’ouvre toujours sur un supplément.
Il faut se laisser saisir par ce que l’on regarde. Ce qui est important, ce n’est pas tellement ce que raconte l’œuvre quand on la voit, mais ce qu’il en reste, ce qui en ressort quand on ne la regarde plus. « Au fond, pour bien voir une photo // image, il vaut mieux lever la tête ou fermer les yeux. Fermer les yeux, c‘est faire parler l‘image dans le silence. » (Barthes). Ce n’est pas tant dans la rencontre avec l’œuvre que le regard critique s’effectue, mais dans le moment où l’on perd de vue l’œuvre pour voir comment celle-ci en vient à se transformer. La pensée se réalise dans le mouvement. Pontalis appelle cela « la pensée rêvante » : « Je rêve d’une pensée de jour qui serait rêvante, non mais rêveuse mais rêvante. S’avancerait-elle comme dans nos rêves sans la conscience de sa destination, entrainée par la seule force de son mouvement. La pensée rêvante que j’appelle de mes vœux puiserait dans le rêve la force d’être irréfléchie, inconvenante, de s’avancer à ses risques et périls comme un somnambule ».
*Judith et Holopherne, Le Caravage.
La force de l’œuvre tient aussi dans la mise en scène. Comment la matière crée-t-elle de la signification? Il s’organise à l’intérieur de l’image quelque chose d’étrange au niveau du chromatisme : le dialogue des couleurs crée un sens qu’il n’y pas dans la Bible. Le corsage de Judith fait écho au drap blanc sur lequel le sang gicle => introduit l’idée que pour tromper Holopherne, Judith a usé de ses charmes (ce qui n’apparait pas directement dans le tableau puisqu’elle est habillé, et lui nu).
*Narcisse, Le Caravage
Forme au niveau du rivage qui se présente dans une rupture. Dans le rapport de proportion, le genoux évoque le visage au dessus. Le Caravage parle ici de la perte du visage.
*Providence Rhode Island, Francsca Woodman
Œuvre autonome, qui n’a pas besoin de référence historique pour exister. Cependant, cet autoportrait s’enrichit aussi du regard que l’on a pu porter sur d’autre œuvre, et n’est pas sans évoquer Narcisse. C’est une femme à travers un miroir, qui ne se regarde pas tant qu’elle se montre, floutée (absence de visage) + Main sur le sexe qui rappelle la Vénus de Giorgione.
2-la fascination.
Starobinski dit : « La fascination émane d’une présence réelle qui nous oblige à lui préférer ce qu’elle dissimule, le lointain qu’elle nous empêche d’atteindre à l’instant même où elle s’offre. Notre regard est entrainé par le vide vertigineux qui se forme dans l’objet fascinant : un infini se creuse, au lieu de nous retenir l’objet se laisse dépasser dans une perspective imaginaire et une dimension obscure ».
La démarche en analyse se situe dans un continuum descripto-analytique. C’est-ce mouvement d’aller retour qui permet au critique d’avancer. Analyser une œuvre, c’est revenir à la matière de l’œuvre, à sa singularité. L’Œuvre d’art est un corps autonome : on comprend la forme de manière indépendante de sa création et de la démarche de l’artiste. Au bout d’un moment, il n’y a plus tellement d’histoire à l’origine d’une forme.
IV/ Quatrième dialectique : représenter la même chose mais de façon différente. Les représentations se nourrissent entre elles.
En quoi la forme devient parlante?
*L’annonciation, Veneziano
Ici, on a une séparation entre l’espace de l’ange et celui de la Vierge. Il se crée aussi, par l’intermédiaire de l’architecture, un lieu d’enfermement de la figure féminine, qui nous apparait aussi verticale que les colonnes. Ce que raconte l’annonciation ici, c’est la scène originelle (cf. l’alcôve qui donne sur une porte fermée, l’ange Gabrielle qui tient des lys, repris dans le couloir, ce qui crée un mouvement entre le premier et le deuxième plan).
*L’annonciation, Titien.
En quoi une œuvre est-elle autonome? En quoi la forme porte-t-elle un sens? Ici, contrairement à Veneziano où le coprs de Marie est en retrait, elle est beaucoup plus en mouvement (plis des habits qui suivent le corps et rappellent les plis de la chair => représentation beaucoup plus sexualisée). Corps féminin ouvert.
*L’annonciation, Le Caravage
Marie ensevelie, repentante. SA posture évoque davantage le deuil.
=> trois œuvres avec le même thème mais qui raconte des choses différentes, toujours sous tendues dans la Légende.
Agnès Minazzoli essaie de comprendre ce qui constitue la nature de l’image. Pour elle, l’image est de nature spéculaire : elle renvoie toujours à d’autres œuvres : « L’image porte en elle une absence que nous ne pouvons combler quand c’est peut être l’absence qui nous conduit au cœur de l’image ». Quelque part, la représentation qui fonde l’image porte toujours en elle un sens caché, « une doublure d’invisibilité propre à toute visibilité ». L’interprète est finalement celui qui essaierait de dévoiler l’œuvre à son autre dimension.
Le visible se tient sur 4 dimensions :
1-l’image s’ouvre toujours sur un supplément.
Il faut se laisser saisir par ce que l’on regarde. Ce qui est important, ce n’est pas tellement ce que raconte l’œuvre quand on la voit, mais ce qu’il en reste, ce qui en ressort quand on ne la regarde plus. « Au fond, pour bien voir une photo // image, il vaut mieux lever la tête ou fermer les yeux. Fermer les yeux, c‘est faire parler l‘image dans le silence. » (Barthes). Ce n’est pas tant dans la rencontre avec l’œuvre que le regard critique s’effectue, mais dans le moment où l’on perd de vue l’œuvre pour voir comment celle-ci en vient à se transformer. La pensée se réalise dans le mouvement. Pontalis appelle cela « la pensée rêvante » : « Je rêve d’une pensée de jour qui serait rêvante, non mais rêveuse mais rêvante. S’avancerait-elle comme dans nos rêves sans la conscience de sa destination, entrainée par la seule force de son mouvement. La pensée rêvante que j’appelle de mes vœux puiserait dans le rêve la force d’être irréfléchie, inconvenante, de s’avancer à ses risques et périls comme un somnambule ».
*Judith et Holopherne, Le Caravage.
La force de l’œuvre tient aussi dans la mise en scène. Comment la matière crée-t-elle de la signification? Il s’organise à l’intérieur de l’image quelque chose d’étrange au niveau du chromatisme : le dialogue des couleurs crée un sens qu’il n’y pas dans la Bible. Le corsage de Judith fait écho au drap blanc sur lequel le sang gicle => introduit l’idée que pour tromper Holopherne, Judith a usé de ses charmes (ce qui n’apparait pas directement dans le tableau puisqu’elle est habillé, et lui nu).
*Narcisse, Le Caravage
Forme au niveau du rivage qui se présente dans une rupture. Dans le rapport de proportion, le genoux évoque le visage au dessus. Le Caravage parle ici de la perte du visage.
*Providence Rhode Island, Francsca Woodman
Œuvre autonome, qui n’a pas besoin de référence historique pour exister. Cependant, cet autoportrait s’enrichit aussi du regard que l’on a pu porter sur d’autre œuvre, et n’est pas sans évoquer Narcisse. C’est une femme à travers un miroir, qui ne se regarde pas tant qu’elle se montre, floutée (absence de visage) + Main sur le sexe qui rappelle la Vénus de Giorgione.
2-la fascination.
Starobinski dit : « La fascination émane d’une présence réelle qui nous oblige à lui préférer ce qu’elle dissimule, le lointain qu’elle nous empêche d’atteindre à l’instant même où elle s’offre. Notre regard est entrainé par le vide vertigineux qui se forme dans l’objet fascinant : un infini se creuse, au lieu de nous retenir l’objet se laisse dépasser dans une perspective imaginaire et une dimension obscure ».