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Art, Histoire et Société - Séance 8 - le 11/04/11

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Maureen LEPERS


Elève dissipé.
Elève dissipé.

Mimésis et Catharsis
Le principe de Mimesis (d’imitation), terme grec employé par Aristote dans La Poétique, repose non pas sur la copie de la nature, mais sur une représentation faite à la manière de la Nature. Il ne faut pas priver la représentation de l’imperfection. On représente quelque chose de divin dès lors que l’on y met de l’imperfection.
*Elsa Wiendelstein, en perdant l’imperfection, elle est devenue un monstre.

Ce qui est gênant dans la catharsis, c’est précisément le sens contemporain qu’on lui donne : la purification des passions, celle précisément qu’il faut éviter dans la Mimésis.

*La Poétique, chapitre IV
-poésis : création en grec.

Aristote dit dans ce texte que la Mimésis est au cœur de l’humanité car nous sommes des êtres profondément mimétiques (principe repris par René Girard : pour lui, tout commence dans notre humanité par cet instinct mimétique). Chez Aristote, la mimésis est liée au principe de reconnaissance : je reconnais quelque chose de moi dans ce que je vois. Cette reconnaissance est une reconnaissance cathartique. Notre capital génétique fait que nous sommes prêts à nous émouvoir devant un certain nombre de représentation. Je ressors plus aimant dès lors que j’ai vécu ce type d’émotions. Cette émotion décharge le capital émotionnel, ce qui fait qu’on en ressort purifié.

Le premier type de représentation est une forme très archaïque du théâtre : l’agôn, la joute, le duel. C’est une joute dansée, rituelle, bien avant d’être verbale, dans laquelle deux camps s’affrontent dans un concours sacré. Ce terme apparait dans le texte d’Aristote, comme étant traduit par « escrimer », la passe d’arme. Cette passer d’arme va représenter des éléments naturels, mais aussi des éléments psychologiques, mélangés : on n’a pas de séparation entre le vice et la vertu. Cette non-séparation est primordiale à la Mimésis.

Aristote cite deux types de représentations très théâtrales : le dithyrambe et la farce satirique. Ces deux formes de spectacles apparaissent a priori vers le IXe siècle avant JC, avant la constitution d’Athènes, en Perse (Phrygie). Le dithyrambe est un poème lyrique au dieu Dionysos, dieu de la Transe. Il est le dieu liant, le garant de la non-séparation des éléments. Le lieu de cette non-séparation est précisément le théâtre, où un personnage peut être à la fois sympathique et antipathique (cf. Œdipe). La farce satirique est phallique : elle consiste en une profusion du phallus (cf. Médée de Pasolini : démembrer pour régénérer // de même, la circoncision est un acte de passage : l’enfant est admis dans la communauté qui va le faire grandir). Cette procession phallique est là pour régénérer.)
*comodeo : le rire sacré, et non pas la moquerie, comme l’a défini Platon.

Dans les deux types de spectacles, on a un chœur et un meneur. Le choryfée suscite d’intervention du chœur : il donne la mesure et lance la mélopée. On a ici quelque chose qui est de l’ordre de la catharsis dans le sens où les travailleurs reconnaissent le bon rythme qui leur permet d’avancer (cf. L’étrange affaire Angélica => séquence des travailleurs) : « lancer le chant sur la rive et tirer ». Rielke.

Aristote fait également une sorte d’historique du théâtre, par le biais de ses principaux protagonistes : le chœur, le meneur (choryfée) et Thespis, qui date du VIeme siècle avant JC. Il est le premier acteur (le prota-goniste : le premier qui fait l’action). Eschyle introduit le deuxième et Sophocle en créera un troisième.

Il faut bien comprendre que cette mimésis est ancrée dès le plus jeune âge. L’enfant représente très vite : il mime.

*René Girard
René Girard corrige quelque peu Aristote. Ce dernier impose un principe de non contradiction en représentation : la chose est ou n’est pas, le terrible ou le pitoyable. Pour lui, deux choses contraires ne peuvent coexister. Cette idée est complètement contestée dans les faits : on peut être horrifiés et s’apitoyer en même temps.

René Girard est celui qui a le mieux prouvé ce principe (notamment dans [i]Le Bouc Emissaire[/i]). Il part d’un principe très simple : mettre des enfants devant une montagne de jouets. Dès lors qu’un se sera saisi d’un jouet, l’autre voudra le même. C’est le principe du tiers inclus.
-Dostoïevski, L’Eternel Mari : un homme insignifiant parvient à se faire aimer d’une fille très belle, jusqu’à ce qu’elle le quitte pour un officier, très beau. Au bout de quelques années, il rencontre une autre femme. Au lieu de vivre son histoire avec sa nouvelle femme, il part à la recherche de l’officier pour la lui montrer => il veut le label de l’officier séducteur. Il fait évaluer sa femme. Cet éternel mari n’accroche l’éternité que par le biais de sa finitude. Lorsqu’on désire un objet, on le désire dans l’optique de le représenter, de le montrer. Le bonheur a besoin d’un label, d’un tiers exclu. Ce tiers exclu est représenté dans le texte d’Aristote par les expressions binaires : « il faut achever ou ne pas achever avec connaissance ou sans connaître ». Cette dichotomie totale entre les éléments sera reprise par les Chrétiens. Dès lors que l’on veut retrancher, on persécute (cf. l’inquisition).

*Préface de Cromwell, Victor Hugo
Après la mort de Léopoldine, Hugo devient un grand mystique. Le cœur du texte est l’inscription de l’idée que ce qui est humainement beau n’est pas exclusivement beau, que le sublime et le grotesque, le beau et le laid, cohabitent et sont indissociables. Cela rejoint le principe des trois forces en physique : une force U et une force V s’exerce d’un même point O, dans deux directions opposées. Automatiquement, une dynamique est créée en O : si les forces sont identiques, le point ne bouge pas, mais si elles sont différentes, il tend à la fois vers l’une et l’autre : il tient de la résultante. Si l’on transforme U en beau ou en vie et V en laid ou en mort, on obtient la dynamique humaine, soit La Poétique. Nous procédons du bien et du mal, du vrai et du faux, du laid et du beau. Dès lors que l’on a une émotion, on peut considérer qu’elle résulte de là. L’émotion est d’autant plus forte que le personnage est ambigu (cf. réinterprétation des mythes américains des années 50 après les attentats du 11 septembre : Harry Potter, Batman et le Joker, Spiderman, Frodo et l’Anneau) : « La muse se demandera si la raison étroite et relative de l’artiste doit avoir gain de cause sur la raison infinie, absolue du créateur, si c’est à l’homme à rectifier dieu, si une nature mutilée en sera plus belle, si l’art a le droit de dédoubler, si chaque chose marchera mieux quand on lui aura oté son muscle, son ressort. » L’un des personnages mythologiques qui représente le mieux cette tension est le centaure, à la fois humain au-dessus de la ceinture, et animal en dessous. La partie animale cependant n’est pas forcément la partie méprisable. C’est aussi la partie primale, celle qui existait avant l’homme. Ce n’est pas forcément positif/négatif : je suis humain et divin, je suis primal et secondaire. Mais rien que de le dire, c’est encore découper.

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